Vos témoignages

Introduction

Toute personne peut contribuer en déposant un témoignage dans cet espace, dès lors qu’elle s’engage à respecter au préalable les règles de la Charte de modération et d'utilisation. Cet espace de témoignages est un lieu où le respect d’autrui est primordial.

Je témoigne
Paul
Décès paisible de mon beau-père
Mon beau-père est décédé d'un cancer du poumon (ancien fumeur) après une maladie qui a duré 18 mois environ. Ses derniers mois se sont déroulés en hospitalisation à domicile, ma mère était près de lui et l'a courageusement accompagné jusqu'à la fin. Il souffrait, lors de notre dernière rencontre, il m'a dit "j'en ai assez, il est temps que je parte". Mais il se savait aimé, sa douleur était bien soulagée, il a "profité" jusqu'à la fin de ses instants parmi nous. Il s'est éteint paisiblement (et "naturellement"). Les dernières semaines ont permis à ma mère d'entamer le travail de deuil.
Je me suis beaucoup interrogé récemment sur l'impact qu'aurait eu une loi sur la fin de vie sur la fin de sa vie. En première approche, ma mère aurait été "soulagée" de ne plus avoir à le porter si sa fin de vie avait été hâtée. Mais je suis convaincu que serait resté dans un coin de sa tête un regret de ne pas l'avoir accompagné jusqu'au bout, comme une culpabilité.
Et s'il y avait eu une loi, la possibilité d'abréger sa fin, je suis aussi convaincu que, de manière lancinante, la question se serait posée : "pourquoi ne pas hâter ma fin puisque je ne suis qu'un poids, la source de souffrance de mon épouse et de mes proches ?". Il était profondément humain, il aurait forcément pensé aux autres avant de penser à lui, et se serait "sacrifié".
Donc pour cette raison, ma conviction est faite : il ne faut pas ouvrir cette boite de pandore (par contre, il faut développer les soins palliatifs et la sédation profonde, qui évite toute douleur pour la personne en fin de vie, mais ça, c'est déjà dans la loi)
Anne Sophie
Expérience de fin de vie de papa chez nous
Bonjour,
Papa a fait un AVC l'été alors que nous étions réunis en famille, il a été hospitalisé et a gardé tout le côté droit paralysé...
Il était dans un état d'angoisse et de déprime tel qu'il disait "je veux mourir" !
Il a été rapatrié de cet hôpital du lieu de vacances vers une clinique de soins de suite proche de son domicile, maman a essayé de le récupérer chez elle mais elle n'avait pas la place car leur chambre était des dimensions d'un appartement moderne, trop petite...
Il a refait des micro AVC lui donnant des problèmes de déglutition: nous sentions que c'était la fin et il était terriblement seul à cause des visites de plus en plus réduites liées au contexte sanitaire...
pour Noël maman n'a pu le voir qu'une heure dans toute la semaine ;-(
Nous avons alors décidé avec mon mari et nos enfants de le rapatrier chez nous où nous avions une belle chambre donnant sur le jardin pleine de lumière et où nous savions qu'il serait entouré de l'amour de sa femme qui l'a accompagné, de sa fille, de son gendre et de ses nombreux petits-enfants ;-)
Il a ainsi pu terminer sa vie avec ce mois tout à fait "extra-ordinaire" où nous étions remarquablement accompagnés par une équipe d'infirmiers et par l'équipe des soins palliatifs avec hospitalisation à domicile: ce ne fut vraiment pas lourd pour nous tellement nous étions bien entourés et lui a retrouvé le sourire, a partagé des repas familiaux, a pu avoir tout un accompagnement spirituel également et il est mort aux côtés de sa femme chez nous en paix!
Face à l'angoisse de nos malades ou de nos mourants, offrons-leur l'amour de notre foyer, développons les soins palliatifs et l'hospitalisation à domicile pour permettre ces moments exceptionnels en qualité: tous nos enfants (à l'époque de 14 à 25 ans) ont témoigné de leur joie d'avoir pu accompagner leur grand-père chez eux et de tout ce que ça leur a apporté en maturité, en force de vie !!
Michelle
Derniers mois de vie de notre fils.
Notre fils, atteint par un cancer du rein à l'âge de 44 ans, et vivant dans une Maison d'accueil médicalisée, avait été transporté à l'hôpital de la ville et sans espoir de guérison. Pour le voir plus facilement, nous demandons alors un transfert dans l'hôpital le plus proche de notre lieu de résidence. En plein été, les lits sont "fermés", donc pas de place pour lui... Nous nous décidons alors pour l'Hospitalisation à Domicile. Grosse organisation, mais avec l'aide nécessaire, et le matériel livré chez nous, nous l'accueillons dans sa propre chambre pour les derniers mois de sa vie. Quelle belle inspiration n'avions-nous pas eue ! En dépit de cette mort annoncée, nous avons vécu avec notre fils trois mois de bonheur, j'ose le dire ! Bien traité par les infirmières, les aide-soignantes, bien "sédaté" pour ne pas souffrir, notre fils a passé ces derniers mois entouré par son papa et sa maman, et toutes les personnes venant rendre visite à la maison. Il ne souffrait pas, bien traité chimiquement pour cela.
Jusqu'à la dernière semaine avant sa mort, nous avons vécu dans une bulle de bonheur, malgré l'approche inéluctable de la fin. Si mon témoignage peut servir, c'est à cela qu'il faut s'atteler : quand c'est possible, l'accueil du malade à la maison est une solution extraordinairement bénéfique pour lui et sa famille.
Amox
Pourquoi
Pourquoi ne pas remettre en question l'acharnement thérapeutique? Remettre une limite plus adaptée?
Pourquoi ne pas plutôt réfléchir à comment recruter du personnel et ensuite ouvrir plus de lit de soins palliatifs afin de pouvoir accompagner les patients en fin de vie plutôt que leur enlever la vie?
Pourquoi plutôt que d'accompagner la mort ne souhaitez vous pas mettre en place une système de psychologue/chiatres spécialisés dans l'accompagnement dans la souffrance physique et morale qui conduit à une demande de fin de vie?
Pourquoi ne pas être dans un processus de respect de la vie tout simplement?
Alice
Mon père est mort
Mon père est mort, trop jeune, trop tôt. Malade, il a décompensé de manière violente après une opération. Les soins suite à la chirurgie ont été en dessous de tout. Mais lorsqu'il a changé d'hôpital puisque victime d'une infection nosocomiale, sa prise en charge a été remarquable. Les médecins ont compris qu'il ne fallait pas s'obstiner déraisonnablement, et il est mort sans qu'ils aient besoin de le tuer.
Marie-Judith
Des pardons à donner et à recevoir
Ma belle-mère de 96 ans est décédée en novembre 2022 aux urgences de l’hôpital Bichat à Paris, au bout de 12 jours d’agonie. Dès son arrivée les médecins nous ont prévenu qu’elle vivait ses dernières heures. Et par ailleurs elle était très handicapée depuis plusieurs années, ne voyant plus (DMLA), ne marchant plus, entendant très mal, et gardait très peu de mémoire. Elle exprimait depuis longtemps qu’elle désirait mourir.
Et pourtant cela a mis 12 longs jours !
Et que s’est-il passé pendant ces jours ?
- le 3eme, profitant de la présence de ses 2 fils et de ses 2 belles filles, elle nous a fait comprendre qu’elle voulait que nous l’embrassions. Elle a même réussi à nous prendre un par un dans ses bras, et à prendre le temps de nous regarder, d’un regard qui disait « je t’aime » et « je te demande pardon pour le mal que je t’ai fait ». Malgré la DMLA, nous avons tous les 4 ensemble reçu ces regards.
- le 6 e jour elle est revenue avec moi, par gestes et onomatopées, sur un drame de sa jeunesse, la perte d’un enfant, semblant chercher à reprendre cet enfant dans ses bras.
- le 10e jour, à l’instigation du médecin, stupéfait de sa résistance, nous avons cherché qui manquait autour de son lit. C’était sa sœur, avec laquelle les relations avaient été un peu compliquées. C’est le questionnement du médecin qui a permis de faire déplacer cette sœur, de lui faire exprimer des griefs tus depuis des années, et qu’elle accepte de venir passer quelques heures à son chevet.
Alors, plus aucun soutien médical n’a plus semblé nécessaire au médecin, qui a enlevé la sédation légère qu’il avait mise en place. Ma belle-mère a vécu très calmement ses 2 derniers jours d’agonie, elle ne souffrait plus, parce qu’elle avait vécu les pardons qui la bloquaient et la gardaient en souffrance.
Un merci très particulier à l’équipe des urgences de l’hôpital Bichat qui lui a laissé, et nous a laissé, la possibilité de vivre naturellement ces 12 jours. Que sont 12 jours dans 96 ans de vie ? Pour ma belle-mère, il s’est passé quelque chose de capital, qu’on n’aurait jamais pu imaginer ni prévoir.
Non à l’euthanasie ! On ne peut jamais savoir les beautés qu’il nous reste à vivre même quand tout semble fermé !
Valérie
Aide spirituelle à mourir
Je suis aumônier catholique en Ehpad public. Une de mes mission consiste à visiter les personnes et à les accompagner dans leur derniers moments si elles ou leur famille le désirent. Je précise que j’interviens auprès de toute personne qui en fait la demande, quelle soit sa religion ou son absence de religion. J’ai été particulièrement frappée par une personne sans famille, qui n’avait aucune famille connue mais souriait à chaque visite. Elle n’était pas en état de parler. Aussi le personnel avait-il repéré que cette personne appréciait ma présence. Le dernier jour de sa vie, le personnel du service m’appelle, me présente la personne comme agitée, angoissée. Que faire ? On se sent si démuni ! Devant sa faiblesse et la mienne, je me mets à chanter doucement, à caresser sa main. Une bulle de paix s’établit. Au bout d’un long moment, j’hésite à partir, comment la laisser ? J’aimerais rester avec elle mais je dois partir. Je lui dis que je la laisse mais que ma pensée l’accompagne. Pour la première fois, elle dit «  merci “ : je n’en reviens pas. Le lendemain, j’apprends que cette personne est morte deux ou trois heures après ma visite. Et je réalise que j’ai accompli mon devoir d’humanité, si humble et si noble: donner la confiance, permettre à cette personne de s’apaiser pour s’abandonner dans la mort. Je ressens que je « l’ai accouchée » vers ce nouveau monde. Et que finalement nous appartenons à une même famille, celle des humains. Une joie grave me remplit.
Claire
Les soins palliatifs, un lieu de vie
Maman est morte en novembre 2012 d'un cancer qui s'était généralisé, elle venait d'avoir soixante ans. Elle aimait la vie, son mari, ses enfants et sa famille. Elle s'est battu jusqu'au bout. Mais quand elle a compris que la fin était proche, elle a demandé à être transférée dans un centre de soins palliatifs et elle est entrée dans la maison Jeanne Garnier à Paris, où elle a terminé sa vie terrestre. L'accompagnement qu'elle a reçu là bas, de la part des médecins, des infirmières, des aides soignantes, des psychologues, des aumoniers et de tout le personnel et les bénévoles a été magnifique. Elle est morte sereine, en confiance, et accompagnée. Dire qu'elle n'a pas souffert serait faux. Bien-sûr que le détachement est un déchirement. Bien-sûr que partir vers l'inconnu, seul, en laissant ceux qu'on aime, est angoissant. Bien-sûr qu'elle souffrait de nous voir pleurer. Mais tout a été fait, objectivement, pour adoucir ce passage et pour apporter le plus de paix possible. Ce sont des heures de vérité, où celui qui va mourir se dépouille et se détache. Nous avons vu notre mère se préparer à mourir, et nous pouvons témoigner qu'elle a été merveilleusement accompagnée. Elle a gardé sa lucidité jusqu'aux dernières heures, et quand son agonie a commencé, les médecins, avec son accord, avec professionnalisme et humanité, dans un profond respect de ses volontés, l'ont accompagnée par une sédation. Chaque geste a été pesé, réfléchi avec elle et avec son mari, pour atténuer sa souffrance, tout en respectant sa volonté de vivre sa vie jusqu'à son terme naturel. Quelle humanité dans cet accompagnement, et combien nous avons été aidés, nous aussi ses proches, à vivre cette si lourde épreuve qu'est la perte d'un être aimé. La mort est présente à Jeanne Garnier, mais la vie est là aussi, précisément dans l'accueil et l'accompagnement de ceux qui meurent et de leurs proches. On se sent vivant à Jeanne Garnier, car on est dans l'essentiel. Merci aux centres de soins palliatifs de toucher le coeur de notre humanité, et de proposer la tendresse et l'espérance.
Manon
Respectez mon métier
Je suis soignante, mon métier est d'aider les gens à vivre, pas de les tuer. Je pourrais citer des dizaines de patients n'ayant pas eu accès à des soins palliatifs (qui leur auraient permis de partir confortablement) alors que nous en avons demandé. Nous n'avons pas le temps/l'énergie/les moyens pour nous occuper comme il faut de nos patients, de nombreux collègues sont en arrêt ou ont quitté l'hôpital, donnez nous des moyens au lieu de nous proposer de les tuer... Si un jour on nous demande d'achever des patients, je partirai aussi.
Laurence
Maman est partie quand c'était son heure, bien entourée
Maman était en phase terminale de cancer, hospitalisée à domicile. Nous pouvions la ramener à l'hôpital si elle souffrait trop. Ce que nous avons fait un soir. Elle a été mise sous pompe à morphine, et le personnel du service a été aidé par une équipe mobile de soins palliatifs. Elle a été consciente quelques jours avant de sombrer dans le coma, sous perfusion constante. A l'arrivée le médecin nous avait dit qu'il lui restait 10 jours maximum de vie. Les membres de la famille et les amis sont venus la voir, l'embrasser, et nous ne l'avons pas quittée - un lit supplémentaire avait été mis dans la chambre. Pour nous c'était dur, mais elle s'accrochait, et est décédée au bout du 10e jour, tout à la fin : elle aimait la vie et n'avait pas envie de partir. Elle est partie quand elle était prête. Ces quelques jours ont été un temps, un sas de transition très fort pour nous tous.
Cela m'a fait découvrir les soins palliatifs. Puissent-ils être mis en place partout, pour éliminer les douleurs de fin de vie, et privilégier la qualité du temps qui reste...
Ninon
Enrouré donc vivant
Mon père, Roger, né en 1937, universitaire brillant, a passé sa vie à dire qu'il ne voulait pas devenir dépendant et se ferait euthanasier quabd il se szntirait décliner. Peut-être était-ce parce qu'il ne voulait rien devoir à personne ni peser sur quiconque, parce qu'il pensait aussi que nous ne occuperions pas de lui, comme il ne s'etait pas occupé de nous. Il cotise depuis toujours à l'ADMD. Il s'était donné jusqu'à 80 ans et m'avait assuré qu'il avait de quoi, qu'il avait des gens pour faire le nécessaire, m'accusant de ne pas être fiable sur ce point. Or, à 85 ans, avec un parkinson bien avancé, et mis sous tutelle, il est toujours là. Une fois passées les bouffées d'orgueil, une fois sécurisé, il est là et veut continuer à vivre. Je suis persuadée que ma découverte du soutien d'autrui a modifié son rapport à la vie.... et à la mort. Je ne pense pas que l'adulte puisse décider pour celui qu'il deviendra. On change. Et heureusement qu'il ne s'est pas trouvé de bonne âme pour avancer son trépas. Mais si on ouvre les vannes de l'euthanasie, on façonnera des moeurs qui encourageront au suicide plutôt qu'à l'experience de la vie, qui, même diminuée, reste une vie, et une vie digne. Si on convainc les gens que leur vie est indigne, et qu'ils coûtent cher à la société (cf les retraites longues, les vieux coûtent cher, si on les expédie, ça règle le problème des retraites - il y a clairement une question économique derrière l'aspect compassionnel), ils demanderont "librement" à mourir. Mais, mon père m'en a convaincue, le soin et le respect créent l'envie de vivre. A nous de l'attiser.
Marine
Pathologies douloureuses chroniques et directives anticipées
J’ai 52 ans et je suis malade et handicapée avec des douleurs chroniques importantes depuis plus de 30 ans .Voici les directives que j ai écrite après mûre réflexion .
« J’énonce, ci-dessous, mes directives anticipées pour le cas où je serai un jour hors d’état d’exprimer ma volonté.Si je suis atteinte d’une affection incurable qu’elle qu’en soit la cause, ou victime d’un accident grave entrainant une dégradation irréversible de mes facultés mentales, ou me plongeant dans un coma, un état végétatif ou pauci-relationnel chronique : Je demande aux équipes médicales de tout mettre en œuvre pour
que l’on soulage efficacement mes douleurs physiques et ma souffrance morale . Il sera très important de prendre en compte mon historique de douleurs chroniques depuis l’âge de 20 ans.
Il y a un manque de formations et de moyens en France alors que les moyens de soulager la douleur sont nombreux : je souhaite avoir une prise en charge de la douleur dans un service adapté et performant.
Si ce n’est pas déjà le cas , mon souhait est d’être transférée le plus en amont possible dans un service de soins palliatifs afin de recevoir un soutien physique, psychologique et spirituel et mourir dans les meilleures conditions possibles.Le soulagement des douleurs doit pouvoir faire appel à tous les soins possibles médicaux ou non et selon mon état de conscience ( respiration +, relaxation, hypnose, massage etc...) En ce qui concerne l’hydratation et alimentation artificielles, la décision d’y mettre fin devra être argumentée auprès de moi même ou mes proches . Si elles sont bien tolérées en petites quantités je souhaite une poursuite et un arrêt seulement en cas de surcharge et de justification médicale .
Pas d’acharnement thérapeutique ni prolongation artificielle ( sauf le temps que la famille ait pu venir dire au revoir si accident par ex) En cas de souffrance réfractaire , je souhaite pouvoir bénéficier d’une sédation temporaire réversible et d’une réévaluation de la situation. Une sédation nocturne réversible pourra aussi être discutée . De même en cas de troubles respiratoires insupportables résistant aux thérapeutiques disponibles , je souhaite un apaisement par une sédation temporaire si les anxiolytiques associés aux autres traitements notamment ne suffisent pas à rendre la situation supportable. Si je demande une sédation prolongée pour souffrance psychique réfractaire , merci aux soignants d’éviter de passer à côté d’une demande d’accompagnement dans un moment plus difficile mais peut être limité dans le temps.
Je souhaite éviter / retarder une éventuelle sédation profonde et continue jusqu’au décès car le maintien d’une relation avec les soignants et mon entourage est très important pour moi et l’est aussi pour eux.
Merci de veiller particulièrement à l’accompagnement des proches ne supporteraient pas l’absence de sédation profonde prolongée.
Je souhaite avoir une relation de confiance avec le corps médical et refuse toute forme d’euthanasie . « 
Constance
Soins palliatifs
Ma grand-mère âgée de 91 ans est morte il y a un mois. Elle était suivie en soins palliatifs depuis 6 mois. Elle s’est laissée accompagner et aimer avec beaucoup de simplicité et de douceur pendant la fin de sa vie. Sa douleur et son inconfort ont été très bien pris en charge (oxygène, patchs de fentanyl, soins infirmiers et kiné) par une équipe très délicate et attentive. La présence de ceux qu’elle aimait a été un immense réconfort pour elle, elle était si heureuse d’avoir de la compagnie.
Matei
Très beaux souvenirs des soins palliatifs
Mon père était en fin vie dans un grand hôpital parisien. Il souffrait beaucoup et les infirmières étaient rares (plus de 30 minutes entre l'appui sur le bouton et leur arrivée). Une fois transféré en soins palliatifs il a fallu 30 minutes pour qu'il n'ait plus jamais mal jusqu'à sa mort. Aussi beaucoup d'attention et de disponibilité. Massages, temps de parole, diverses activités, il est parti en paix. Alors que j'appréhendais sa souffrance à l'hôpital toute crainte s'est effacée et son séjour en soins palliatifs a été une libération pour lui et nous. Donc avant de même penser à tuer les gens, encore faudrait-il leur proposer les soins palliatifs pour tous et partout. Pour moi parler euthanasie avant d'avoir finie cette étape ne fait aucun sens.
Marie-Laure et Jacques
Directives anticipées et responsabilité individuelle
Dans notre couple, nous aimons la vie et la réflexion sur les conditions de notre mort est déjà ancienne : nos premières directives anticipées (DA) datent de 2008 et nous les avons actualisées en 2013 puis en 2018 et au tout début 2023, en nous désignant réciproquement personne de confiance.

Nos DA sont stockées notamment dans 'Mon Espace Santé' et nous les portons sur nous à côté de notre Carte Vitale (qui n'en fait pas mention !).

Lors d'une consultation très récente, nous avons remis la dernière version de nos DA à notre médecin généraliste; comme lors de RV précédents (ex : visites de contrôle annuel), elle a pris nos documents et les a classés dans un dossier, en restant encore silencieuse sur nos questions concernant l'accompagnement de notre fin de vie.

Nous nous demandons combien de médecins, de personnels soignants, d'enseignants en médecine et de professionnels para-médicaux ont rédigé leurs DA et choisi au moins une personne de confiance.
Et alors, que conclure sur l'exemplarité de ces professionnel.les ?

NB : le modèle de DA disponible sur le site gouvernemental nous a toujours fait l'effet d'un repoussoir : sur ce sujet de la fin de vie sensible et complexe où la réflexion est intime et difficile, le formulaire proposé est beaucoup trop technique avec des questions médicales auxquelles nous ne savons//voulons pas répondre; nous suggérons un cadre beaucoup plus ouvert (non médicalisé a priori) pour favoriser la rédaction de DA, mêmes minimales, qui indiqueraient un début de responsabilisation de chacun.e sur sa fin de vie. Selon nous, les DA devraient être obligatoires dans ce formalisme simplifié (en prévoyant des annexes médicales pour les personnes qui le souhaitent).

A la fin de nos DA, nous avons écrit : “Je décharge mes personnes de confiance, les médecins et soignants me traitant et mon entourage de tout scrupule de responsabilité, puisqu'ils agissent selon ma volonté, en conformité avec mes directives anticipées, dans le respect de ma dignité et de ma volonté.”

En effet, nous voulons rester pleinement responsables de notre vie jusqu'à sa fin, c'est-à-dire jusqu'à notre mort incluse, et ne pas nous défausser sur les médecins et le personnel (para-)médical en leur faisant porter des responsabilités excessives parce qu'elles ne leur appartiennent pas.

En outre, le déséquilibre actuel des responsabilités a lieu dans un système hyper-spécialisé et peu collaboratif et/ou mal coordonné (cf hôpital//médecine de ville, généralistes/spécialistes, …) qui favorise le risque d'obstination déraisonnable (nous la refusons absolument) ou de discontinuité de la “prise en charge” et, au passage, engage des moyens matériels et psychologiques croissants impossibles à satisfaire indéfiniment.

Même en contexte médicalisé, nous pensons qu'il faut retirer au corps médical la délibération, la décision et la réalisation de l'aide à mourir éventuelle en privilégiant de leur part les soins adaptés et l'information non biaisée.
Bernard
Toute vie est digne tant qu'on peut aimer et être aimé
Avant de mon opération pour un cancer, on m'a demandé d'écrire mes directives anticipées et de désigner une personne de confiance pour qu'elle puisse donner son avis si je n'étais plus en mesure de m'exprimer. J'ai été très gêné par cette démarche que je comprends mais qui me précipitait dans une perspective de fin de vie, alors que les médecins qui me suivaient n'avaient pas de pronostique alarmant à mon sujet. J'imagine que pour certaines personnes cet acte peut apporter un doute dans le discours des médecin surtout quand après l'opération les résultats ne se pas si bons qu'annoncés au début. Le moral, d'autres dirait la confiance ou la foi comptent beaucoup pour aider le patient à se battre contre cette maladie. Cet acte a eu le mérite de m'obliger à en parler avec la personne de confiance, mon épouse. Mais je l'ai très mal vécu. Il me semble que la loi Claeys-Léonetti répond à quasiment tous les cas de figure mais qu'elle n'est pas bien connue ni appliquée, faute de moyens. Je trouve que faire évoluer cette loi vers l'euthanasie est indigne d'une société évoluée.
J'ai recopié sur le titre ce que j'ai mis dans mes directives anticipées, parce que, pour moi, la seule dignité qui compte c'est le partage de l'amour ou de l'amitié sous toutes ses formes. Et si je n'ai pas sombré dans la dépression à la fin de mon adolescence c'est grâce à ma rencontre avec des personnes porteuses de handicap très variés. Ce sont elles qui m'ont redonné envie de me bouger pour retrouver du sens à ma vie.
Notre pays fait beaucoup pour les maladies de longue durée, et je suis bien content de pouvoir en profiter. Je peux aussi dire que c'est beaucoup plus facile de luter contre une maladie grave quand on est bien accompagné, par nos proches, mais aussi par le personnel soignant qui est de plus en plus sous pression financière. Et là il y a beaucoup à faire pour améliorer cette prise en charge. Quand je me suis retrouvé aux urgences avec des douleurs violentes, aigües, le personnel a attendu une heure pour appeler le chirurgien qui m'avait opéré et qui était de permanence et qui était le seul à savoir comment me soulager. Il y avait une surcharge des admissions et un défaut de formation du médecin urgentiste. Les métiers du soin méritent toute notre considération, à l'échèle individuelle mais aussi collective. Ne passons pas à côté de ces priorités pour sortir une loi populiste.
Mathis
fin de vie d'un nouveau-né
Je m’appelle Mathis. Je suis né le 24 mars, et je suis décédé le 13 avril 2015. La loi Leonetti a autorisé les médecins à me laisser mourir, mais d’une manière cruelle et inhumaine. Moi, nouveau-né, je suis mort de faim et de soif ! Lors de l’accouchement, je n’ai pas eu l’apport nécessaire en oxygène ce qui a sévèrement endommagé mon cerveau. La sage-femme m’a posé inerte sur le ventre de ma maman. La pédiatre m’a réanimé, mais je n’avais aucun tonus et aucune réactivité.
On m’a transféré en néonatalogie-réanimation d’un grand CHU français pour placer mon petit corps 3 jours en hypothermie. Il s’agit actuellement de l’unique thérapie qui permet de stabiliser les lésions cérébrales. Je respirais grâce à une machine. On m’a posé une sonde urinaire, et j’ai été perfusé pour qu’on m’administre une forte dose de sédatif afin que mon cerveau soit totalement au repos. L’encéphalogramme était déprimé, et ne montrait que des signaux disparates. On a commencé à me nourrir par sonde gastrique, et j’ai continué à recevoir un sédatif ainsi que de la morphine. Afin de confirmer les lésions cérébrales, on m’a fait passer une IRM à mon 7ème jour de vie. L’IRM a montré de graves lésions de mes noyaux gris centraux, ce qui entraine un handicap moteur sévère ainsi qu’une forte probabilité d’handicap cognitif. Afin de m’éviter une vie à l’état végétatif, mes parents ont demandé dès mon 1er jour de vie de ne pas faire d’acharnement thérapeutique. Suite à l’IRM, les médecins ont décidé de ne pas me réanimer si cela devait s’avérer être nécessaire. Ainsi, à mon 8ème jour de vie, on a enlevé le respirateur pour voir si j’étais autonome sur le plan respiratoire. Je respirais parfaitement malgré mes sévères lésions. A mon 10ème jour de vie, on a diminué la dose de morphine pour me sevrer. Mes parents ont vu mon visage se crisper. Ils m’ont entendu pousser de petits cris qui exprimaient mon mal-être. A mon 12ème jour de vie, on a retiré la sonde gastrique afin de voir si j’allais être autonome sur le plan de l’alimentation. Mes parents, qui étaient depuis toujours à mes côtés, se sont relayés toutes les 3h car ils devaient me proposer un biberon. A mon 15ème jour de vie, je n’avais pas bu un seul biberon, et je n’en ai jamais réclamé. Mes parents ont supplié les médecins de m’administrer un sédatif et de la morphine de sorte que mon corps s’endorme paisiblement. La loi Leonetti autorise l’arrêt de l’alimentation chez les nouveau-nés, et les médecins ont attendu que mon corps se dégrade à petit feu pour que je meure tout seul « comme un grand ». J’ai passé 10 jours sans être alimenté avant de m’éteindre à tout jamais. La loi Claeys-Leonetti semble inadaptée aux spécificités de la néonatalogie. Tous les néonatalogistes n’interprètent pas cette loi de la même manière, comme l’explique le Dr. Véronique Fournier du Centre d’éthique clinique de Cochin. La loi veut donner un cadre aux médecins, mais supprime le rôle des parents, qui sont entendus mais pas écoutés.
Jocelyne
Pas de proposition de soin palliatif
Ma belle mère , adhérente à l'ADMD. a fait un AVC. Elle a été transférée de l'hôpital vers un établissement de soins de suite et de réadaptation pour personnes âgées, en région parisienne. Son état de santé s'est vivement dégradé, elle geignait , souffrait, ne pouvait plus s'exprimer mais ses yeux le faisaient pour elle. La gériatre de cet établissement ne l'a pas renvoyée vers l'hôpital . Elle nous a dit qu'elle allait mourir, mais elle a mis plus de 2 jours à la soulager car nous étions présentes tous les jours et avons insisté chaque jour pour qu'on la soulage. Jamais, le médecin n'a proposé un transfert en soin palliatif. J'ai même proposé qu'elle vienne chez moi avec un service adapté. "Trop compliqué "a t-elle dit car il faut que son médecin traitant passe tous les jours. Je me suis renseignée après "c'est faux".: c'est une équipe dédiée qui vient au domicile. Bref plus de 3 jours d'agonie. Mon fils qui était son référent a eu de mal à s'en remettre. Il a dit " elle me faisait confiance et elle est morte comme on ne l'aurait pas accepté pour un chien "
Claire
J'ai accompagné mon père dans sa maladie - ses derniers jours ont été inhumains
J'ai épaulé mon père dans sa maladie durant plusieurs mois. Un cancer du Pancréas qui a fini par l'emporté. Mon père a certes eu la possibilité d'avoir accès a un service de soins palliatifs (le personnel a d'ailleurs été merveilleux) mais sa fin a été dramatique. Entré debout et autonome il a très vite eu un soucis au cerveau qui l'a transformé en "légume". Il ne pouvait plus parlé, plus mangé ...Une souffrance pour lui qui par ces gestes nous montrait son agacement. Cette situation a duré plusieurs jours. Plusieurs jours pendant lesquels il ne pouvait plus nous parler, nous dire ses souffrances, ses angoisses ou tout simplement son ressenti. J'ai supplié qu'on l'aide ... son état était désespéré ...j'ai obtenu la sédation totale au bout d'une semaine quelques heures avant son décès...j'ai trouvé cette semaine beaucoup trop longue...Il faut vraiment faire avancer le débat ...que chaque citoyen puisse avoir une fin de vie conforme à ses croyances et ses souhaits.
Bien sur que papa voulait vivre...mais pas survivre et surtout pas dans l'état dans lequel il a été la dernière quinzaine.
Philippe
"Mieux que la fin de vie du malade incurable, pensez à la fin de vie du citoyen !"
Le débat en cours montre le souhait de plus en plus partagé de donner la priorité à la volonté de chacun de choisir les conditions de sa fin de vie.

Si l'on rapproche cela de l'avis du CCNE pour qui « il existe une voie pour une application éthique de l'aide active à mourir », on peut penser qu'il y aurait un large soutien populaire à une loi légalisant l'aide active à mourir..., sous réserve, et c'est ce qui pose problème, de ne pas ouvrir la voie à des dérives suicidaires incontrôlées.

Alors, pourrait-on trouver des conditions d'application qui permettraient d'éviter ces dérives ?

Ce qui est commun à toutes les situations de fin de vie, c'est la perte irréversible d'autonomie, c'est à dire ne plus pouvoir assurer soi-même ses déplacements, ses repas, son hygiène... Cette situation peut durer plus ou moins longtemps avant le décès, être plus ou moins pathologique, et être plus ou moins douloureuse, mais elle marque toujours l'entrée dans la phase terminale. C'est ce que l'on peut vouloir abréger.

Ainsi la condition d'accès volontaire à une aide active à mourir pourrait être définie comme la perte irréversible d'autonomie, pour cause de maladie incurable, d'accident ou de vieillesse.

De la sorte les dérives indésirables seraient évitées, car le décès à terme est alors inéluctable. Cependant, le diagnostic de perte irréversible d'autonomie peut-il être établi en toute objectivité (condition requise pour une législation consistante) ?

Notre système de santé dispose pour cela d'un moyen d'évaluation de la dépendance : c'est la grille AGGIR qui est utilisée pour évaluer le niveau de perte d'autonomie, ou de dépendance, des personnes âgées en vue de l'attribution des aides sociales. C'est une évaluation professionnelle et objective.

L'adoption d'une loi sur la fin de vie, accordant l'accès volontaire à une aide active à mourir, sous condition de perte irréversible d'autonomie, serait une réforme institutionnelle fondamentale, avec des effets essentiels :

- Combler le vide législatif et institutionnel actuel, dans le respect des valeurs républicaines et laïques qui garantissent la liberté de l'individu tant qu'elle ne contrarie ni la liberté d'autrui, ni l'intérêt général.

- Donner la main au pouvoir public, seul légitime pour valider la procédure de demande de fin de vie volontaire, et décharger ainsi le corps médical d'une responsabilité décisionnelle qui ne lui convient pas.

- Confier à l'autorité de santé, seule compétente, le soin de définir les procédures d'application de l'aide active à mourir adaptées à l'état de santé du postulant : selon qu'il est déjà, ou non, hébergé dans un établissement de santé, et selon qu'il s'exprime lui-même ou par le truchement de ses directives anticipées et de sa personne de confiance.

- Donner à chacun de la sérénité dans ses perspectives d'avenir, en le laissant seul maître de ses décisions en temps utile, et dans l'écoute notamment des plus âgés.
Laurent
témoignage de ma mère quelques jours avant son suicide : "Si j'avais pu choisir ma fin de vie, j'aurais pu vivre plus sereinement et plus longtemps".
Bonjour,
Je tiens à partager le témoignage que ma mère a écrit quelques jours avant de se suicider

"J'aime la vie et j'en ai profité au maximum. Actuellement, à 79 ans, j'arrive encore à garder une certaine autonomie, mais mon pronostic est lourd; ma vie se dégrade et tôt au tard je deviendrai grabataire avec problèmes respiratoires et cécité. Or, pour ma part, je trouve inhumain et inutile de supporter de telles souffrances, la déchéance et la perte totale d'autonomie.
Il y a longtemps que j'ai réfléchi au problème de fin de vie et dès les années 80 j'ai adhéré à l'ADMD dans l'espoir que nous finissions par obtenir, comme dans certains pays voisins, une possibilité de fin de vie douce et d'aide au suicide. Je précise que je suis nullement mandatée par cette association et j'écris cette lettre de ma propre initiative.
Nous avons le mot "LIBERTE" au fronton de nos mairies. Qu'en est-il pour sa fin de vie ? Ne serait-ce pas une liberté fondamentale que celle de pouvoir programmer sa mort lorsque l'on se rend compte que la vie est devenue définitivement insupportable ? Aider à mourir : il ne s'agirait pas de donner la mort mais de respecter la volonté de la personne qui souhaiterait partir avec toute son intégrité physique et intellectuelle, le plus sereinement possible. Or, dans notre pays, face à la mort, il y a ceux qui partent sans souffrance, naturellement. Pour les autres, 2 solutions :
- la solution plus fréquente et dite "normale" : se retrouver à la charge de la société ou de ses enfants, plus ou moins en souffrance et attendre ... attendre ... la fin
- 2ème solution: le suicide avant que n'arrive la déchéance, partir comme un voleur, seul (avec le risque de ne pas réussir ...)
J'aurais voulu une mort paisible et sereine, le plus tard possible, entourée de mes enfants et amis. Cela n'étant pas possible je me vois dans l'obligation de prendre
cette 2ème solution et de partir prématurément, seule, avant de ne plus pouvoir le faire.
S'est-on posé la question de savoir combien de personnes en arrivent à ce geste ?
Bien sûr, les lobbies sont extrêmement puissants en France : catholiques intégristes, une certaine partie du corps médical et tous ceux qui gravitent autour de lui, les laboratoires pharmaceutiques pour qui les personnes âgées dépendantes représentent une valeur sûre...
Je respecte ceux qui désirent finir d'une mort naturelle, mais arriverons-nous un jour, en France, à ce qu'une personne en phase avancée d'une affection incurable ou estimant que son état de dépendance est incompatible avec sa dignité, puisse choisir et éventuellement demander que lui soit pratiquée une aide active à mourir sous contrôle médical ? Un jour, dans ma profession d'infirmière, un médecin m'a dit : "Je n'ai pas donné la mort; selon la volonté de la personne, j'ai aidé la mort à s'accomplir".
Si j'avais pu choisir ma fin de vie, j'aurais pu vivre plus sereinement et plus longtemps.
Catherine
Entendre mon refus de devenir le fantôme de moi-même
Diagnostiquée malade à corps de Léwy, au milieu de ma quarantaine, j’ai vécu le séisme psychique que représente l’annonce d’une maladie neurodégénérative incurable relativement mal connue. De là, j'ai dû entièrement redéfinir ce qu'il est convenu d'appeler mon "projet de vie" ; cette réflexion comporte aussi à mes yeux celle de la fin de ma vie.
La maladie va me faire perdre des acquis aussi fondamentaux que ma lucidité, ma motricité, ma propreté et ma parole. Qui serai-je alors ?
Dans ces conditions vivre comme un fantôme ne correspond pas à la conception que j'ai de l'existence, ni à celle que je voudrais imposer à mon entourage. Je tiens à ce que mon conjoint, mes enfants, ma famille gardent de moi une image digne, responsable et autonome.
Je souhaiterais le moment venu c'est-à-dire à partir de critères clairs, objectifs et mesurables correspondant à la dégradation de mon état de santé, pouvoir être aidée à mourir, c'est-à-dire bénéficier d'un suicide médicalement assisté.
Les professionnels de santé qu'ils soient neurologues, psychiatres, psychologues ou généralistes, refusent d'entendre ma demande - à terme - de suicide assisté. Leurs propos visent à minimiser la souffrance psychique qui résulte actuellement de la maladie puis sera amplifiée par son évolution. Cette simple négation de ma souffrance accroit évidemment la crainte de l'avenir.
Puisque notre société nous reconnaît la possibilité de mettre fin à une vie autre que la nôtre, par l'avortement, pourquoi ne pas accepter la volonté de certains, à savoir les personnes atteintes de maladies incurables, d'être aidées à mourir simplement, efficacement et légalement au moment où elles l'auront choisi ?
La situation actuelle aboutit à l'exemple de la problématique de l'avortement dans les années 60/début 70 à ce que seules les personnes qui en ont la possibilité intellectuelle et matérielle puissent bénéficier d'un suicide à l'étranger : n'est-ce pas nier la souffrance d'une partie de la population ?
Est il normal de devoir partir en Suisse et payer plus de 10 000€ ! pour pouvoir mettre fin à ses souffrances ? Est il normal de partir en Belgique et après 6 mois de souffrances supplémentaires (leur délai de carence), pourvoir mettre fin à ses souffrances ?
Concrètement ma demande serait de pouvoir bénéficier d'une consultation avec un neurologue et un psychologue ou psychiatre afin de codéfinir une grille de symptômes avec une cotation de leur évolution sur laquelle je me prononcerais afin de définir les limites où je juge acceptable de vivre selon l'évolution de la maladie. Une telle grille serait donc à la fois spécifique à chaque pathologie et personnalisée par la tolérance individuelle des symptômes. Ainsi, sa précision irait au delà des « directives anticipées » actuelles, qui peuvent être source d’interprétation. A partir de cette grille spécifique, lorsque les critères pré-définis et co-construits seraient atteints, je souhaiterais pouvoir recevoir un cocktail létal pou
Julie
Fin de vie bébé
Bonjour,
Je souhaite vous faire part de mon témoignage concernant la fin de vie de mon bébé Théo. Il est né grand prématuré en août 2020. Admis en réanimation néonatale, il a reçu multiples traitements et examens avant qu'on ne se rende compte qu'il souffrait d'une leucomalacie periventriculaire à cause de sa prématurité et naissance dans un contexte inflammatoire. Ce sont des kystes formés dans le cerveau. Pronostic très sombre, avec très probablement un état végétatif pour Théo. Après multiples avis pris auprès de centres hospitaliers en France et au Canada ; et avec l’appui des images d’une IRM montrant des lésions extrêmes, les médecins décident d’arrêter les soins de Théo, qui relèvent vraiment d’un acharnement thérapeutique au vu du pronostic de son évolution.
Seulement, en 2020, au vingt et unième siècle, aucune loi ne vient en aide au corps médical afin d’accompagner un nouveau-né autonome vers une fin de vie. En effet, en un mois de vie, Théo a appris à respirer seul. Il a pris du poids, il pèse maintenant 2kg400. Comment mettre en place des soins palliatifs sans outrepasser les lois ? La décision a donc été prise d’arrêter les soins relevant d’un acharnement thérapeutique.
Le seul soin qui restait à Théo ? Sa sonde d’alimentation. Il a donc été décidé d’arrêter d’alimenter Théo et le laisser vivre ses derniers instants, en lui administrant un médicament en sublingual si nécessaire pour éviter les périodes de mal-être. En 2020, n’existe-t-il aucun moyen plus juste, et surtout plus humain, pour accompagner un nouveau-né vers la liberté ? Nous avons dû regarder notre bébé mourir de déshydratation pendant sept jours. Parce que oui, les nouveau-nés ont une force insoupçonnée. Théo s’est battu durant sept jours, sept jours où la soif l’a envahi, sept jours où ses parents l’ont vu dépérir. Ces sept jours ont marqué la mort de mon enfant, mais surtout ils ont fait perdre toute estime à une maman. Comment continuer à avancer sans avoir un sentiment de culpabilité ? Le deuil d’un bébé est déjà quelque chose d’insurmontable en lui-même. Mais le deuil de son bébé mort de déshydratation, dans un lit d’hôpital, en 2020, est-ce vraiment qualifiable ? Je n’en veux aucunement à l’hôpital, je fais partie moi-même des métiers de la santé, et je sais qu’ils ont fait leur maximum pour aider Théo à partir le plus sereinement possible. Ils ont emprunté la seule petite brèche possible afin de soulager notre bébé et lui éviter une vie se résumant à respirer et dormir. La tâche a été très compliquée pour le corps médical, car le cas de Théo était exceptionnel et relevait d’une situation inédite.
Par ce témoignage, j'aimerais aider à faire évoluer cette loi Leonetti-Claeys sur la fin de vie. Il existe des situations où l'on devrait pouvoir aider les gens à être libérés. Le cas de mon bébé le montre très franchement.
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